
Dans l’imaginaire collectif, la maternité rime souvent avec bonheur et célébration de la vie. Pourtant, la quête de la parentalité, l’expérience de la grossesse, de l’accouchement et du post-partum n’est pas toujours aussi idyllique. La parentalité n’échappe pas aux contradictions de notre société actuelle où liberté, capacité, avancées médicales et productivité s’entrechoquent. Depuis quelques années, de nombreuses personnes osent partager leurs histoires, leurs parcours en procréation médicalement assistée (PMA), leurs vécus d’accouchements difficiles et d’expériences traumatiques comme la fausse-couche ou la mortinaissance. Des voix s’élèvent de divers milieux pour nommer certaines pratiques comme étant des formes d’abus ou de violences gynécologiques et obstétricales, appelant à repenser les approches. Les conditions d’accouchement ont été à nouveau un sujet d’actualité et de débat de société dès le début de la pandémie, durant laquelle des milliers de femmes ont accouché en solitaire : diverses méthodes d’accouchement ont momentanément été empêchées, montrant ainsi que la maternité demeure un terrain de revendications féministes et un terreau fertile de réflexions.
À l’automne 2019, à la suite d’un appel à dossiers lancé par la Chaire McConnell-Université de Montréal en recherche-création sur la réappropriation de la maternité, trois candidates ont été sélectionnées et invitées à développer chacune un projet artistique. Réappropriations. Acte 1 est la pointe de l’iceberg de ces années de travail. À l’origine, il était prévu d’organiser une exposition-trace de quelques semaines au Centre d’exposition de l’Université de Montréal (CEUM) afin de mettre en valeur le travail des artistes en résidence. Puis les bouleversements que nous avons vécus à partir de mars 2020 ont fait en sorte que l’ensemble des activités du CEUM ont été révisées. Le concept d’une exposition en ligne a alors vu le jour, avec de nouveaux défis et aboutissements. Se lancer dans cette exposition a permis aux artistes l’exploration de nouvelles perspectives tout en poursuivant leurs démarches respectives en collaboration avec la commissaire Marianne Cloutier. L’œuvre conceptuelle et évolutive Témoins s’inscrit dans le projet Mère à tout prix de Heidi Barkun portant sur l’expérience de l’abus en PMA, tandis que l’œuvre Elle m’a dit de Caroline Boileau est au cœur du projet Ces langues que parlent les femmes au sujet des tabous liés à la maternité et au désir de maternité. La série d’œuvres vidéo de Kimberley de Jong, avec le projet (M)other, s’intéresse aux vécus de la transition vers la parentalité.
La recherche-création
À la Chaire, nous définissons la recherche-création comme le point d’ancrage de tous nos travaux intersectoriels, où la théorie se mêle à la pratique, où l’artiste peut transgresser les frontières qui séparent le laboratoire de l’atelier. Il n’est pas coutume d’inviter des artistes professionnelles à se joindre aux travaux de recherche menés dans le monde universitaire. D’ailleurs, au courant de l’année 2020, les artistes ont été confrontées aux normes éthiques de la recherche universitaire, très loin des enjeux de la création artistique. À la Chaire, nous pensons que c’est dans la multitude des expériences et la multiplicité des discours que la connaissance progresse; nous considérons que l’art et la science participent d’une même quête du savoir sans instrumentalisation ni objectification de l’un des deux domaines par l’autre. Tous les projets présentés dans le cadre de cette exposition virtuelle s’articulent autour de rencontres avec des participantes recrutées pour témoigner de leurs expériences personnelles. La recherche-création, sans être thérapeutique, permet aussi de tisser des liens durables entre le monde académique et le milieu communautaire par l’entremise de l’art.
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Les œuvres que vous découvrirez abordent des moments de bonheur et de détresse, des états limites, de deuils et de découvertes. Nous vous invitons à un esprit d’empathie, de délicatesse et de respect. Des ressources sont disponibles ici : n’hésitez pas à les utiliser pour vous ou vos proches pour un soutien adapté. Un formulaire pour écrire aux artistes est disponible à la dernière page de l’exposition. L’équipe du Centre transmettra les messages à qui de droit.
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